Pascal Maitre est le lauréat de la 13ème édition du Prix de Photographie Marc Ladreit de Lacharrière pour son projet « Les Peuls. Du retour de l’identité au risque djihadiste ».
Depuis plus de 40 ans, il parcourt le monde afin de raconter en couleur le genre humain. Le photographe globe-trotter qui se qualifie lui-même de « montreur d’histoires »; est un amoureux de la couleur et des émotions qu’elle procure.
En photographie, ses maîtres à penser sont Henri Cartier-Bresson, pour son « art de la composition et de l’instant décisif », et William Albert Allard, pour « son génie de la couleur ».
Depuis ses débuts en 1979 dans le Groupe Jeune Afrique, le photographe n’a cessé d’aborder les multiples facettes du continent africain : les hommes et leur mode de vie, la politique et les conflits, les traditions.
Si l’Afrique reste son terrain de prédilection, le photographe a également réalisé plusieurs photoreportages sur d’autres zones du monde : Proche Orient, Amérique du Sud, Sibérie… Il a notamment signé en 1998 la photo du commandant Massoud qui se repose après avoir mené une attaque pour reprendre aux talibans la ville de Taloqa.
Il a travaillé avec de prestigieuses publications internationales, en France (Géo, Paris Match, Figaro Magazine, L’Express, ELLE), et à l’étranger (Geo et Stern en Allemagne, National Geographic aux Etats-Unis).
Son travail a été exposé deux fois à la Maison Européenne de la Photographie et une dizaine de fois à Visa pour l’image. Il est représenté en France par l’agence MYOP et à l’étranger par l’agence Panos Pictures.
« Le peuple peul compte 35 millions d’individus, du Sénégal au Niger, du Tchad au Soudan. Les Peuls ont en partage une langue, le pular, et un particularisme transfrontalier, le pulaaku, qui représente une manière stricte et codifiée d’« être Peul », sorte de code d’honneur partagé. Le bétail en général et les vaches en particulier demeurent un des piliers de la culture peule, ainsi qu’une puissante foi en l’Islam. Les Peuls ont, de tout temps, été des pasteurs nomades, ce qui explique leur présence dans de nombreux pays de la bande sahélienne. (…)
La croissance démographique et le réchauffement climatique fragilisent la situation de ce peuple millénaire, traditionnellement pasteur. Les pâturages se réduisent, leur mode de vie est bouleversé, et la pression économique se fait de plus en plus forte.
Pour une partie des populations peules, la radicalisation djihadiste est perçue comme une solution. Elle entraîne une augmentation du rythme et de l’intensité des conflits entre communautés nomades peules et cultivateurs Dogons, Bambara et Mossi. Les combats font des milliers de morts et des millions de déplacés chaque année.
Mon projet sur les Peuls documentera d’un côté le mode de vie et les traditions peules, alors qu’elles sont en train de disparaître, et de l’autre l’attrait d’une partie de ces populations vers le djihadisme, qui risque de faire du Sahel une zone encore plus instable qu’elle ne l’est déjà. Plus que jamais, le peuple peul est aujourd’hui à un tournant de son histoire, et c’est ce tournant que je souhaite photographier. »
– Pascal Maitre
Portfolio Pascal Maitre
Les Finalistes de l’édition 2020
Raed Bawayah, Olivier Jobard et Sophie Zénon ont été déclarés finalistes de cette 13ème édition.
Raed Bawayah – Extraits du projet : L’Obscurité de la Lumière
Après dix années passées dans le domaine de la construction, Raed Bawayah décide de quitter son travail pour réaliser son rêve d’enfance : devenir photographe.
Il rejoint le département de photographie de la Musrara School of Art. Sa première exposition alors qu’il y est encore étudiant, est un succès. Elle est consacrée à une série de portraits des enfants de son village.
Après avoir obtenu une bourse de l’Ambassade de France pour une résidence à la Cité internationale des arts, il s’installe définitivement à Paris où il vit maintenant depuis 15 ans.
Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions en France et à l’étranger (Allemagne, Autriche, Israël, Russie, Espagne, Italie, Palestine, Malaisie, Mexique, Belgique, Suisse, etc.)
« Mon projet est un voyage photographique de commentaire en noir et blanc dans la vie obscure des femmes, hommes et enfants noirs qui sont considérés et utilisés, encore légalement comme des esclaves en Mauritanie. La Mauritanie reste un des rares pays qui pratique encore l’esclavage.
Une des meilleures choses qui soit arrivée à l’humanité est, au XIXème siècle, la décision d’établir l’abolition de l’esclavage. Depuis cette date, des millions de personnes ont pu enfin ressentir le droit à la liberté, droit fondamental de l’être humain. Cet événement a pu amener l’être humain de l’ombre à la lumière, grâce à des individus qui ont laissé leurs empreintes dans l’Histoire pour mettre un terme aux pressions de l’esclavage.
De par son origine, l’homme naît pour voir la lumière et être libre. La liberté est un droit fondamental, lumineux, comme l’est la photographie à travers son message humain. Il est vrai que la photographie est une invention technique mais bien sûr aussi une invention humaine. C’est pourquoi la photographie est avant tout un message et un engagement humain. »
– Raed Bawayah
Olivier Jobard – Extraits du projet : Le chemin de Moustafa
Membre de l’agence MYOP, Olivier Jobard est à la fois photographe et documentariste. Ancien élève de l’École Louis Lumière, son travail a voyagé dans le monde entier.
Il a couvert de nombreux conflits dans le monde : Croatie, Bosnie, Tchétchénie, Afghanistan, soudan, Sierra Leone, Libéria, Côte d’Ivoire, Colombie, Irak…
En 2013, il est le lauréat de la Bourse Tim Hetherington du World Press Photo.
Après avoir couvert de nombreux conflits comme photojournaliste, il se rend en 2000 à Sangatte où il rencontre des exilés afghans, tchétchènes, irakiens, bosniaques. De ces échanges dans ce « dernier caravansérail » naît l’envie d’étudier les questions migratoires.
Son principal allié est le temps : « je reste avec eux pour créer complicité et confiance ». La question de la temporalité est omniprésente dans son travail, car elle l »est dans la vie d’un migrant, où attente et urgence alternent de façon imprévisible.
« La route migratoire entre l’Éthiopie et les pays du Golfe est hors des radars médiatiques alors qu’elle est plus empruntée que celle de la Méditerranée.
C’est à travers le destin de Moustafa, rapatrié en Éthiopie et de ses amis qui triment en Arabie Saoudite, que je souhaite raconter le destin d’une jeunesse qui ne rêve que d’exil, quel qu’en soit le prix à payer. (…)
Mon projet s’inscrit plus largement dans la continuité d’un travail documentaire sur l’Homme en migration, entamé il y a 20 ans. La route éthiopienne a beau être méconnue, elle a jadis été pratiquée par Arthur Rimbaud, Joseph Kessel ou Henry de Monfreid. J’ai le sentiment que sur ce chemin, où j’échange avec Moustafa et ses amis, se trouve un peu de la vérité de notre monde.
Pour réaliser un travail en forme de dialogue, je tiens, lors de mon dernier séjour en Éthiopie, à présenter à Moustafa mes photographies de ses amis, esclaves modernes. Il me racontera ses rêves brisés. Ses mots seront apposés à mes photographies et celles de ses camarades. Ses paroles seront aussi apposées à mes photographies de ce périple migratoire réalisées en 2019.»
– Olivier Jobard
Sophie Zénon – Extraits du projet : Les Dormeurs de la Forêt
Sophie Zénon explore les grands thèmes de l’existence : la mémoire, la mort, la filiation, les relations de l’homme à la nature. Ses créations se déclinent sous la forme de séries photographiques, de livres d’artiste, d’éditions, de vidéos, d’installations.
Image-palimpseste, empreinte, transparence, éblouissement, basculement des temporalités, réactivation d’archives mais aussi technique du geste et matérialité font partie de son vocabulaire plastique.
Son activité alterne entre des réponses à des cartes blanches, sa production personnelle, des recherches sur le geste et les savoir-faire dans les métiers d’art et des ateliers pédagogiques auprès de publics du champ social.
Sophie Zénon est l’auteur de trois monographies, de cinq livres d’artistes et lauréate de plusieurs prix dont celui d’Eurazeo (2019), de la Fondation des Treilles (2015), et du prix Kodak de la Critique (1999).
« Les arbres ont fait l’objet, ces dernières décennies, de découvertes scientifiques prodigieuses, d’expositions et de livres aux succès croissants. Parallèlement, nombre de forêts naturelles dans le monde continuent à être détruites par la déforestation ou par les bouleversements climatiques. La crise écologique que nous traversons met en danger la biodiversité mondiale et le sort de générations futures. Elle témoigne aussi d’une crise de la sensibilité de nos sociétés humaines : un appauvrissement de ce que nous pouvons percevoir, comprendre et tisser comme relations à l’égard du vivant. Nous avons perdu l’expérience de la nature.
Convaincue de l’urgence à protéger la forêt, de l’utilité de l’art pour contribuer à sensibiliser le public, mon projet souhaite ré-enchanter notre imaginaire appauvri en portant un regard amoureux, poétique et sensible, mais aussi critique et engagé sur la forêt. Convaincue également que le merveilleux se trouve à côté de nous, mais aussi pour limiter mes déplacements, mon projet s’appuie sur dix forêts « naturelles » françaises à la beauté sauvage et saisissante, choisies en collaboration avec l’ONF et les Réserves Naturelles de France (RNF). Il n’existe plus en France de forêts primaires, mais des forêts dites « naturelles », abritant une richesse élevée d’espèces. Legs de l’Histoire, ces forêts sont aujourd’hui rares et méconnues. Par la présence de vieux arbres, de quantités de bois morts, d’une composition spécifique et de fonctionnements écologiques naturels (mortalité par vieillesse ou perturbation naturelle), elles constituent un patrimoine extraordinaire et sont un élément clé de résilience de la biodiversité forestière face aux changements climatiques. Dernières reliques ou forêts d’avenir ? La question reste ouverte.» – Sophie Zénon
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