Julien Coquentin raconte un hiver à Montréal avec sa série Tôt un dimanche matin.
Il a travaillé pendant 2 ans aux urgences d’un hôpital de Montréal. Chaque matin après sa garde de nuit alors qu’il retournait chez lui, il a immortalisé ces matins d’hiver à l’ambiance si particulière.
A Montréal, l’hiver n’est pas un vain mot. Pour les montréalais, l’hiver rime avec neige et froid. Situé loin de la mer, Montréal connaît un climat de type continental avec de brusques fluctuations de température, des étés chauds et des hivers froids. Dans la région de Montréal, la période d’enneigement est de 12 à 13 semaines. La température moyenne en hiver est de -10°C et oscille entre -30°C et 0°C.
Quelques anecdotes sur la rudesse du climat :
– Les 6 et 8 juin 1816, des bourrasques de neige ont balayé Montréal. Quelques jours plus tard, le 10 juin, il est tombé 30 cm de neige à Québec.
– Durant les cinq jours que dura la tempête de verglas en janvier 1998, la région délimitée par les villes de Saint-Hyacinthe, Farnham et Saint-Jean-sur-Richelieu a reçu quelque 100 mm de pluie verglaçante.
« Pendant deux années j’ai photographié Montréal. Je souhaitais alors écrire une poétique de la ville et de l’éloignement, une balade américaine en somme. Je travaillais de nuit aux urgences d’un grand hôpital et habitais le quartier cosmopolite du Mile-End. Cette Amérique-là se confondait à mes rêves de gosse et aujourd’hui les sensations les plus nettes qui me restent en mémoire, sont celles que je ressentais les matins d’hiver. Je sortais de l’hôpital, imprégné de l’odeur et de l’humeur des autres, dans le froid glacial. Il n’y avait plus de parfum. Je me souviens de boulevards vides et blancs, de la neige qui tombait doucement, en silence. On était dimanche et par dessus tout, j’aimais photographier ces moments-là. »
Julien Coquentin
Photos © Julien Coquentin
Né le 16 novembre 1976 à Rodez, il se passionne pour la photographie depuis 2007 et son travail a été exposé en France et à l’étranger à de nombreuses reprises.
Pixfan : Pouvez-vous nous décrire votre parcours photographique ?
Julien Coquentin : J’ai réellement commencé une pratique assidue de la photo en janvier 2007 lorsque j’ai découvert les possibilités qu’offraient les appareils numériques. Jusqu’alors il ne s’agissait pour moi que d’un moyen d’imprimer ses souvenirs… souvenirs de voyages… souvenirs de famille… Je prenais des photos sans y penser, sans passion. Lorsque les APN se sont endurcis, j’ai compris comme beaucoup qu’il était à présent bien plus facile d’apprendre la photographie, la volonté n’était plus limitée par le nombre de pellicules, il était possible de cramer 1000 clichés tout en gardant le sourire, il devait donc être envisageable d’apprendre ce qui jusqu’à présent appartenait pour moi à une histoire mystérieuse, celle qui se terrait dans les chambres noires…
P : Comment procédez-vous ? Texte et ensuite prise de vue ou l’inverse ?
JC : J’ignore exactement comment les mots sont arrivés à la suite de l’image, disons que je publiais sur un site communautaire et que j’ai fini par ressentir le besoin de prolonger mes images par des histoires qui m’appartenaient, certains clichés m’évoquaient un récit et la réunion des deux m’a rapidement parue naturelle et évidente.
Je n’ai pas de manière de procéder déterminée et systématique, les choses se font au quotidien. Il arrive que la photographie précède le récit, d’autres fois l’histoire existait avant l’image et parfois encore les deux naissent ensembles dans un recoin de ma tête et le plus difficile alors est de retranscrire fidèlement ce que je veux. Pas à pas, je me plais à conter l’existence de quelques un(es) en cheminant sur des styles photographiques que je souhaite dissemblables. Une belle curiosité, des goûts éclectiques et une perpétuelle insatisfaction m’apportent de savoureux plaisirs et je ne me lasse pas à expérimenter de nouvelles choses. Je ne crois pas trop à l’instant figé, une photographie est à mon sens toujours continuée, que ce soit par son auteur lorsqu’il la repositionne dans son contexte ou encore par celui qui la regardera et qui imaginera son histoire. Pour cette raison j’aime jouer avec les longs temps d’expositions, dépasser l’instant arrêté pour inscrire une photo dans la durée, la continuer par du mouvement, des corps découpés.
P: Qu’est ce que vous aimez dans la photographie ?
JC : Finalement ce qui me transporte dans la photographie c’est ce moyen assez simple de raconter des histoires, de se construire un monde qui n’appartient qu’à soit parce qu’il sera construit de deux choses essentielles, sa propre vie et son regard… Il n’y a qu’à se plonger dans les bouquins de photos pour se rendre compte qu’il y existe une infinité de sensibilités et que c’est un mouvement qui apparait sans fin, du moins tant que l’on n’aura besoin de se représenter le monde. La photographie est entrée dans ma vie doucement pour devenir une obsession délicieuse et je m’étonne toujours que l’on puisse aimer mes clichés tellement j’ai la sensation d’être encore si éloigné de ce que je souhaite.
Lien : www.juliencoquentin.com